jeudi 27 décembre 2012

Lorsque Henry James rencontra Klimt


Cela fait partie de ces films qui  illustrent si  bien une période,   celle que je nomme "Russian Ballets" (1900-1917) et qui  évoque  pour  moi pêle-mêle  la Sécession, l'orientalisme de Poiret, la fougue  des  ballets  de Diaghilev, la Vienne de Stefan Zweig, Freud  et  l'invention  de  la psychanalyse...                                           Une  période  de changements, où l'individu souffre pour libérer ses sentiments, s'affranchir des codes sociaux  et se confronter à ses propres faiblesses. Basé sur le drame psychologique éponyme de Henry James (1902), "The Wings of the Dove" nous  plonge dans un amour impossible où les personnages principaux sont confrontés à la passion et au cynisme.

       "Judith I" de Gustav Klimt




"Portrait d'Emilie Flöge" de Gustav Klimt




Londres 1900, l'héroïne, Kate Croy (Helena Bonham Carter) a l'opportunité de ré-intégrer la Haute Societé (à laquelle sa mère appartenait et qu'elle avait quitté par amour), à condition qu'elle se sépare de son amant Merton Densher qui n'est qu' un simple journaliste. Kate cherche à couper les liens mais leur amour est trop fort.

C'est à ce moment qu'entre en scène Millie, douce, fragile et riche héritière, que Kate cherche à utiliser pour arriver à ses fins... 

Et puis Venise, lieu de trahison, décor luxueux et troublant de beauté : là où tout se joue, où l'amour se confronte à l' argent et où les personnages révèlent leurs failles multiples. Le trio amoureux se met en place...



"Poissons d'or"  de Gustav Klimt




"Serpents d'eau"  de Gustav Klimt




J'ai vu "The wings of the Dove" au cinéma, il y  a  une  quinzaine d'années déjà, mais je n'ai pas oublié l'effet esthétique que chaque scène a eu sur moi : je me souviens très précisément  de chaque  décor,comme le  fumoir ci-dessous, aux nuances de bleu  évoquant  les thermes de l'Hôtel Gellert à Budapest ou les robes  diaphanes et le visage pré-Raphaélite de  Millie (Allison Elliot)... si liés à l'ouvre et 
l'univers onirique de Klimt.  

Ornementation, motifs stylisés, reflets, dorures... Presque chaque scène fait référence à une oeuvre du peintre. Tout est là pour traduire le trouble. C'est pour cette raison que ce film est plus qu'une  reconstitution classique. On y aborde  une période riche - clôturant l' époque Edwardienne  et révélant l'esthétique Belle Epoque - mais aussi "la confusion des sentiments".





  "La musique"  de Gustav Klimt




Tout en abordant les thèmes de la liberté individuelle et de la morale Henry James explore cette haute societé européenne, distinguée mais corrompue ("l'Américain", "Portrait de femme" et "Les ailes de la Colombe"). Il confronte des jeunes américaines comme Millie, (héroînes de ce Nouveau monde qu'il veut plus vertueux, franc et impulsif), à la noirceur mal dissimulée de la High Society. 

Comédie sociale, ambivalence, manipulation: tous les ingrédients pour bâtir un roman captivant et un film d'une beauté toute dramatique et picturale. En voici l'illustration...




 "La dame au boa de plumes" de Gustav Klimt


"Danaé" de Gustav Klimt


Photo chaise style Thonet  SLAVIA VINTAGE


Images du film "The wings of the dove" 1997
Réalisateur : Lain Softley

mercredi 19 décembre 2012

Les neiges d'antan : les sports d'hiver vus par Hemingway


Après la Première Guerre Mondiale, le ski alpin, pratiqué depuis la fin du XIXe par une poignée de mordus anglais, connait les prémices de son essor dans les stations des Alpes, et recrute notamment  parmi la communauté américaine restée sur le Continent après le conflit. Ce n'est pas étonnant, ce sport alors rejeté par les puristes, répond au crédo des membres de la "Génération perdue": soleil, émotions fortes, grand air et généreux gueuletons arrosés d'eau de vie!!!

Ernest Hemingway compte ainsi parmi les premiers à fréquenter assidument ces villages où s'invente la mode des sports d'hiver : Gstaadt, Zermatt, Cortina... Dès 1922, il y conduit sa jeune femme Hadley pour de longues retraites entre ski et randonnées. 

En 1926, le couple y coule encore des jours heureux évoqués dans Paris est une fête. Mais le temps des pionniers et des pensions prises chez les paysans du cru commence à prendre fin : le ski se popularise, les premières stations sont édifiées (telle Mégève, en 1925), et les pistes  accueillent une société multi-nationale semblable à celle des Palaces de la Côte, en hiver. C'est la fin d'une époque que Hemingway regrette. C'est la fin aussi de son premier mariage...

Extraits de "Paris est une fête" de Ernest Hemingway 1964
Editions Gallimard, collection Folio
Traduit de l'américain par Marc Saporta


Graphisme: Cristiana Couceiro

"Le ski n'était pas ce qu'il est devenu (...). Il n' y avait pas de patrouilles de secouristes et si vous descendiez une pente, vous deviez la remonter(...) Walther Lent pensait que le plaisir de skier consistait à pénétrer dans les régions les plus élevées de la montagne, où l'on ne rencontrait personne, et où la neige était vierge, pour aller d'un refuge à un autre par-dessus les crêtes et les glaciers des Alpes"



"Hadley et moi nous adorions skier depuis que nous avions fait nos débuts ensemble en Suisse, et plus tard, à Cortina d'Ampezzo, dans les Dolomites alors que nous attendions la naissance de Bumby et que le médecin de Milan avait autorisé ma femme à skier si je lui promettais qu'elle ne tomberait pas. (...) Nous connaissions tous, alors toutes les sortes de neige et chacun savait comment effectuer une descente dans la neige la plus poudreuse."


Graphisme: ninetten 57' 

"Pour les paysans de la région supérieure de Montafon, tous ceux qui, comme nous louaient, parmi eux, des porteurs sur le chemin de la Madlener-Haus, étaient des démons étrangers attirés par les sommets dont tout le monde au contraire aurait dû s'écarter"




"L'hiver, à Schruns, je portais la barbe pour me protéger du soleil qui me brulait si cruellement le visage, sur les hautes neiges et je ne me souciais aucunement de me faire couper les cheveux. Un soir, plus tard, alors que descendais à skis la piste des bûcherons, Herr Lent me dit que des paysans que j'avais croisés sur les pistes, au-dessus de Schruns, m'avaient appelé le "Christ noir."


Photo: "Schweizerische Winterkurorte," circa 1935

"Le matin, après le petit déjeuner chacun prenait son barda avant de se mettre en route dans le noir, et nous commencions à grimper sous les étoiles proches et brillantes, avec nos skis sur les émules."


Graphisme: Mark Lazenby




"Au cours de notre dernier hiver en montagne, des nouveaux venus pénétrèrent profondément dans notre existence, et rien ne fit plus jamais comme avant."



Photo: Trevor Orton  



 Photo rangement // SLAVIA VINTAGE



 Photo: Woodlanshop 

dimanche 16 décembre 2012

Anvers : mon guide vintage

Antwerpen. Avant même de connaître cette ville, j'aimais d'office la sonorité de son nom, le fait qu'elle soit un port et le berceau de Dries Van Noten, l'un de mes stylistes préférés. Je me prenais d'ailleurs à imaginer l'essence même d'Anvers au prisme de ses créations: à la fois bourgeoise (à travers ses belles étoffes et ses inspirations du passé), ouverte au monde (avec tous ses imprimés venus d'ailleurs, reflet d'une histoire commerciale faite d'échanges) et résolument moderne.

Et puis il y avait aussi dans ma tête, les images cinématographiques fugaces du quartier des diamantaires...










La découverte d'Anvers il y a quelques années, fut à la hauteur de mon imaginaire. Et ce, dés mon premier pas en ville : en débarquant du train dans la Gare Centrale, sous son dôme somptueux! Une gare imposante à l'allure orientale entourée d' ailleurs d'animaux exotiques avec à ses côtés le Zoo d'Anvers, le plus ancien du pays.

De l'autre côté de la Gare, le long sillon des voies ferrées aériennes coupe en deux le quartier juif orthodoxe, qui est aussi celui des diamantaires. Ce quartier, je l'ai souvent arpenté, sous la fine neige de décembre, lorsque sur le blanc se détachent les silhouettes noires des Hassidims, poussant silencieusement leurs enfants juchés sur des vélos. 

De nuit, à bord du taxi d' un chauffeur ukrainien tout droit sorti de "Little Odessa", le quartier prend des airs de Brooklyn du Nord et glisse comme le décor d'un film de James Gray. Un côté new-yorkais, qui surgit, de temps en temps, dans cette ville multi-culturelle recensant le plus grand nombre de nationalités au monde: pas loin de 200!










Une ambiance à l'opposé de celle du Meir, large avenue commerciale qui égrène une rare densité de flagships, certaines pas assez habituelles sous nos latitudes comme Urban Outfitters! 
Et à l'extrémité de l'avenue, se dresse la banque KBC qui domine la ville... le plus haut gratte-ciel d'Europe dans les années 1930 (juste devant le siège Bata: voir post antérieur: Bataworld 1er octobre 2012).








Changement d'ambiance encore dans les venelles bordées "d'architecture italo-espagnole", qui mènent directement vers le quartier des créateurs et Kloosterstraat, la rue des antiquaires. L'immobilier étant encore bon marché dans la capitale flamande, les galeries y rivalisent d'espace, mettant en valeur, comme rarement! les objets et le mobilier vintage comme chez Viar (65 Kloosterstraat), Full effect http://www.fulleffect.be, Loft styles http://www.loftstyles.eu ou Cult (24 Kloosterstraat). Toujours inspirant.











J'aime Anvers pour tous ses contrastes, sa douceur de vivre "provinciale" et sa créativité de ville cosmopolite. Elle me touche aussi par l'abondance exceptionnelle de bâtiments  de style fonctionnaliste, dotés de grandes baies vitrées pour capter la rare lumière du Nord.  Durement frappée par les deux guerres, Anvers a toujours se relever "avec style"!

Il faut donc y prendre le temps de se perdre, de marcher le long des quais, de traverser des quartiers, car le défilement des façades est un spectacle à lui tout seul. C'est comme ça qu'un soir, près d'un nœud de circulation anodin, je fus interpellée par une villa blanche des années trente: une sorte d'atelier cubique avec une grande verrière. En m'approchant je compris que c'était le lieu de création d'Ann Demeulemeester!!! j'étais en somme, devant la seule villa belge conçue par Le Corbusier (en 1926),
la Maison Guiette.  C'est ça Anvers, tout simplement...

Quelques ADRESSES en + 

Concept store: Your
Café JamWolstraat 47  2000 Antwerpen, Belgique
Restaurant Zuiderterrass 









Crédit photos // SLAVIA VINTAGE

mardi 11 décembre 2012

Back in the USSR


CE CONTENU EST DESORMAIS RÉSERVÉ POUR UNE PROCHAINE PUBLICATION

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lundi 10 décembre 2012

Marseille Mid-century


Dés que j'ai l'occasion de passer par le Vieux Port, je fais un détour pour admirer (et y déjeuner accessoirement!) le restaurant Relais 50 : des couleurs primaires (d'autant plus éclatantes sous la lumière de Marseille) des luminaires et des fauteuils d'esprit 50's, un beau comptoir et du carrelage à damier... Le Relais 50 porte bien son nom mais il est loin d'être un pur phénomène de mode surfant sur la vague «Mad men» (que j'adore par ailleurs). 

L'histoire de l'Hôtel « La Résidence », auquel appartient ce restaurant est résolument marquée par les années 50. C'est en 1954 que l'architecte André-Jacques Dunoyer construit sur le Vieux Port cet Hôtel de style purement moderniste, fréquenté par Aragon, Montand, Ferré... Et c'est donc, tout naturellement, dans les codes "fifties" qu' a puisé le décorateur et architecte Franz Potisek, lors de la rénovation de l'Hôtel entre 2009 et 2010. 


La valeur ajoutée de son travail,  celle d'avoir pris parti en exprimant SA vision  des années 50 qu'il a voulu ULTRA COLORÉE, fantaisiste et bourgeoise. Pour cela il a conçu tous les meubles, tissus et motifs de l'Hôtel (moquettes, rideaux, fauteuils mixés ici et là avec des meubles d'époque comme la tâpisserie "Le Grand Arbre"  de Jean Lurçat située dans le hall) en mettant en avant une valeur 50's pour lui essentielle, celle du « confort moderne ». Le résultat est un décor absolument personnel et cosy. Un passage obligé si vous venez découvrir Marseille 2013!










Crédit photos // SLAVIA VINTAGE